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Steven Soderbergh : (3) the wunderkind is back in town
Solaris : un roman écrit par le Polonais Stanislaw Lem en 1961, adapté pour le cinéma par le Russe Andrei Tarkovski en 1972. Etant donné l’aura de l’un comme de l’autre, il fallait être un peu allumé pour vouloir se lancer dans une nouvelle adaptation une trentaine d’années plus tard. Steven Soderbergh fait partie de ces allumés, pas du tout quelqu’un à être à l’affût de ce que le cinéma américain peut refaire qui a déjà bien été fait ailleurs, encore moins quelqu’un qui sent où se trouvent les machines à cash. Refaire Solaris n’était dès le départ pas la meilleure idée pour faire entrer beaucoup d’argent dans les caisses, même avec la superstar qu’était George Clooney à l’époque, même en rendant plus facile d’accès le récit que Tarkovski. C’est pourtant le projet qu’a réussi à imposer Soderbergh après que sa deuxième carrière avait décollé. Rappelons que la première a commencé sous les meilleurs auspices – Sex, Lies and Videotapes / Sexe, mensonges et vidéo (1989), Palme d’Or à Cannes dès son premier film et surtout carton majeur de par le monde pour un film indépendant peu onéreux – et s’est poursuivie par des œuvres toutes passionnantes à des titres divers mais toutes des demi-échecs ou échecs critiques et publics (Kafka en 1991, King of the Hill en 1993, The Underneath / A fleur de peau en 1995). Out of Sight / Hors d’atteinte (1998) a largement contribué à le faire sortir de l’ornière, de même que – même si avec avec un public plus restreint – The Limey / L’Anglais (1999). La bonne passe a ensuite continué avec des films salués à peu près partout, couronnés par des succès publics (voire des Oscars), qui semblaient indiquer que Soderbergh avait trouvé la martingale : Erin Brockovich (2000), Traffic (2000), Ocean’s Eleven (2001). Solaris aura été le coup d’arrêt. Par la suite, à part les vaches à lait de la série Ocean permettant à Soderbergh de continuer à faire passer auprès de la Warner des projets plus aventureux – The Good German (2006), Che (2008), The Informant (2009), Contagion (2011) – Soderbergh ne retrouvera plus jamais les sommets atteints au début des années 2000. On connaît la suite : il annonce en 2013 qu’il va arrêter de faire du cinéma, trouve refuge à la télévision – soit pour des séries (The Knick en 2014-15, Mosaic en 2018) soit pour des films à destination des chaînes câblées ou des plateformes (de Behind the Candelabra / Ma Vie avec Liberace en 2013 à KIMI en 2022), et revient au cinéma à l’occasion (Logan Lucky en 2017, Unsane / Paranoïa en 2018). J’aime pour ma part Soderbergh à peu près à toutes ses périodes, même si j’ai aujourd’hui un peu de mal à le suivre. Il fait partie de ces cinéastes qui en d’autres temps auraient été des réalisateurs maison enquillant les commandes et les projets personnels sans trop barguigner : d’ailleurs, héritier du Hollywood de l’âge d’or autant que de la génération des années 70 ayant une fois pour toutes fait valoir la primauté du talent créatif des metteurs en scène (et ce malgré les aléas des années 80), Soderbergh avait trouvé sa place auprès de la Warner et aurait bien continué à travailler avec cette major si le vent n’avait pas tourné de façon définitive à la fin des années 2000. Solaris, c’était donc le début de la fin (de la seule très bonne passe de sa carrière en tout cas). Pour ma part, je l’admirais d’autant plus dans les années 2000 qu’il avait réussi à imposer des projets comme Solaris, comme The Good German, comme Che. Je ne pensais pas qu’il rencontrerait de tels échecs avec eux, mais de fait le vent commençait à tourner, et en renonçant à vouloir à tout prix faire dans le divertissement certes intelligent et élégant mais le divertissement avant tout, il se savonnait la planche sans encore trop le savoir.Il faut dire que c’était le moment où Soderbergh, au début de l’ère numérique, faisait sa propre révolution esthétique le conduisant un peu ultérieurement, dans des films aussi différents que Che et Contagion par exemple, à adopter un minimalisme un peu réfrigérant qui n’est sans doute pas pour rien dans le fait que beaucoup de ses films par la suite ont tenu plus d’un spectateur à distance. Le glamour chaleureux dans lequel Soderbergh baignait ses acteurs dans Out of Sight ou Ocean’s Eleven – rappelons que cela faisait déjà beau temps qu’il était son propre chef opérateur, sous le nom de Peter Andrews, et son propre monteur, sous celui de Mary Ann Bernard – s’est estompé peu à peu, quelle que soit la qualité de sa photo dans ses films en numérique d’ailleurs. Solaris, de ce point de vue, se situe sans doute dans un entre-deux : minimaliste, le film l’est de toute évidence, mais il n’a pas encore cette froideur qui marque ses films de l’ère du tout-numérique.Dans la période précédente, donc, il y a eu un moment où Soderbergh, après ce qui pour lui a très nettement été une impasse – The Underneath (dans lequel il y a sans doute plus à sauver que ce qu’il en dit maintenant, d’ailleurs) – a connu une crise majeure, de laquelle il est sorti avec et grâce à Out of Sight. Adapter le roman d’Elmore Leonard était sans doute l’idée parfaite pour ce faire. Le côté cool de la chose convenait bien à Soderbergh, mais pour une coolitude qu’il saurait traiter différemment de ses collègues – rappelons que Jackie Brown date de l’année précédente, et le fait que Soderbergh n’ait pas eu la tentation de « faire du Tarantino » même s’il y a des similitudes entre les deux films dues à la source commune ne compte pas pour rien dans sa réussite*. En sus de faire preuve d’une sobre distance, il pouvait en outre avec une telle matière se livrer – certes en mineur – à ses jeux visuels et narratifs appris chez les uns et les autres, à commencer par Alain Resnais, qu’il pourra développer à plein l’année suivante dans The Limey. Bref, sans faire ouvertement partie de sa veine expérimentatrice, Out of Sight est le premier film dans lequel il fait sciemment entrer des expérimentations dans une matière de film de genre destiné à un large public, avec une réussite patente. L’amusant dans l’histoire étant que, lorsqu’on lui a fait lire le script de Scott Frank, il l’a trouvé formidable, s’est dit que Clooney serait parfait dans le rôle et que lui-même saurait faire, et… a refusé le projet ! Lorsqu’on lui a fait valoir que les étoiles étaient alignées et qu’elles ne le sont pas toujours autant, il s’est laissé fléchir. Bien lui en a pris, non seulement parce que cela a donné un second souffle à sa carrière, mais plus largement parce que cette expérience a sans aucun doute largement contribué à ce qu’il comprenne plus précisément ce qu’il pouvait essayer dans le cadre d’un film de divertissement, ouvertement cool et fun, sans plus trahir la matière qu’il ne se trahissait lui-même.Je parlais un peu plus haut de la photographie ; il en va de même de l’utilisation de la musique. Et bien sûr de ce qu’il demande à ses acteurs, à commencer par les deux principaux. Si tout concourt à glamouriser dans sa façon de faire, il est évident que Soderbergh ne le fait pas en dépit du bon sens et sans goût. C’était le début de cette période dont je parlais plus haut, où sans combattre le glamour apporté par le star system, le metteur en scène savait jouer intelligemment avec ce qu’il lui apportait. D’où le fait que Jennifer Lopez devient ici une véritable actrice, ce qu’elle n’a pas toujours été ailleurs – un autre cinéaste lui ayant donné un véritable rôle dans lequel elle peut s’épanouir aura été Oliver Stone, dans U-Turn (1997). Quant à Clooney, on sait que c’est avec ce film qu’il a entamé avec son metteur en scène une collaboration créatrice – en tant qu’acteur mais aussi que producteur – qui aura donné quelques beaux fruits. Si Soderbergh fait preuve d’élégance dans sa mise en scène, c’est la transformation de Clooney en tant que comédien certes charmeur mais aussi et avant tout élégant qui est entamée ici et qui aura beaucoup fait pour le passage de l’acteur dans une catégorie encore supérieure. Cela faisait quelques années qu’on le comparait, indûment, à Cary Grant – chez Soderbergh, cette comparaison restait sans aucun doute exagérée mais se justifiait tout de même un peu plus.Out of Sight est un des films les plus immédiatement aimables de Soderbergh, et il reste bien plus délectable que bien des produits ‘fun’ qui étaient immédiatement périmés. Il s’est longtemps traîné une réputation de réalisateur cérébral, ce qu’il est sans doute, mais pas toujours – il suffit de voir King of the Hill pour s’en persuader. J’aurais pour ma part préférer qu’il continue à pouvoir mettre à profit un savoir-faire considérable, qui n’existe presque plus dans le cinéma américain, et cette élégance, au service de divertissements de haute volée. Ce n’est plus le cas, et ce n’est qu’en partie un mal pour un bien. En attendant, même si sa carrière continue à avoir des hauts et des bas – mais cela avait commencé assez tôt pour lui – il reste un des rares auteurs sur qui on peut compter, pas pour livrer des opus parfaits, mais pour continuer à être une tête chercheuse, à jouer avec le récit, le format, les interrogations contemporaines autant que le passé du cinéma. *Dans un entretien de Film Journal avec Ed Kelleher, reproduit dans Steven Soderbergh –Interviews (UP of Mississippi, 2015), il explique : ‘I felt that its tone and its approach would be different from Tarantino, because we’re very different people and very different filmmakers. When you look at Barry Sonnenfeld’s Get Shorty and Jackie Brown and Out of Sight, it’s a nice lesson in what a director does to a piece of material through his or her goggles, and makes it something specific. So I wasn’t worried about that. I think Tarantino’s influence has been so significant that people forge the was influenced by other people who came before him, in terms of style and tone and structure of storytelling. These things have been around. It just so happens that none of the films that influenced Tarantino made a hundred million dollars and sort of invaded the culture to the degree that Pulp Fiction did. So I wasn’t really worried about that. I didn’t even occur to me. I knew he was preparing Jackie Brown, but I also knew that it was probably going to be a very different movie than the one I wanted to make.’EDITIONS ‘COMBO’ DVD + BLU-RAY FRANCAISE RIMINI (2021) / BLU-RAY + 4K AMERICAINE KINO LORBER (2022)Il existe n éditions de ce film en dvd comme en blu-ray. Après l’épuisement des éditions originales Universal, c’est Rimini qui a repris le film en France. Le master de la nouvelle édition est très bon, avec à peine quelques variations de grain et de définition sur certains plans. Si l’on cherche une édition 4K, il faudra être anglophone et se porter sur l’édition KL de 2022.Dans tous les cas, les suppléments d’origine se trouvent : un making-of pas mal du tout, avec le concours de Soderbergh et d’Elmore Leonard ; un très bon commentaire audio de Soderbergh, en compagnie du scénariste Scott Frank, cette fois sous-titré en français contrairement à l’édition Universal ; une vingtaine de minutes de scènes coupées. L’édition Rimini propose en outre un échange d’une demi-heure entre les deux critiques Frédéric Mercier et Mathieu Macheret, bien mené et de bonne qualité.Si l’on cherche un dvd ou un blu-ray avec du français, l’édition Rimini 2021 fera donc parfaitement l’affaire. Si l’on cherche les meilleurs blu-ray et bien sûr du 4K, et si l’anglais n’est pas un problème, alors l’édition américaine KL 2022 est celle à préférer.NB Dans cette mini-série de commentaires sur Steven Soderbergh, je vais reprendre ceux que j’ai déjà publiés sur (1) King of the Hill, (2) The Underneath, et les faire suivre de nouveaux sur (3) Out of Sight, (4) Solaris, (5) Mosaic, (6) KIMI, (7) Behind the Candelabra / Ma Vie avec Liberace. J’avais par ailleurs déjà consacré des commentaires notamment aux nouvelles éditions françaises 2021 de Sexe, mensonges et vidéo et L’Anglais, ainsi qu’à The Good German, Che et Contagion.
A**.
Très bien !
Article arrivé en très bon état et dans les délais !
V**T
Chef d'oeuvre
C'est le meilleur film de Jennifer Lopez et de loin, réalisation parfaite, acteurs parfait, scénario au top. C'est un bon film assez subtil qui s'enchaîne vraiment bien.On ne tombe pas dans le cliché ou dans l'amour facile malgré le couple Lopez/Clooney.Ce n'est pas qu'un film de série b c'est un bon film tout court, il mérite plus de reconnaissance et de succès.
M**E
Très bon film à avoir dans sa dvdtheque
J'adore ce film, donc mon avis est un peu faussé...
Trustpilot
5 days ago
2 days ago