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Great Lakes Suite
W**J
Four Stars
4 stars
P**R
in a good way.
YEAH! can't stop listening to these discs. they'r reorganizing my molecular makeup. in a good way.
A**Y
if you love good jazz order now !
This is a must !
A**E
Recommended for all
Thank you. Recommended for all.
J**S
4.5 Stars. Modern jazz for modern times.
Like a fine wine, Wadada Leo Smith has gotten better with age. Now one of the revered “elder statesmen” of modern jazz, Smith’s work of the past decade has rightfully brought his career as a whole into sharper focus and earned it a deeper appreciation.With “The Great Lakes Suites,” Smith brings together a dream ensemble that includes Henry Threadgil on alto sax, flute, and bass flute, John Lindberg on bass, and Jack DeJohnette on drums.While the Great Lakes might seem like an unlikely source of inspiration for a jazz suite, Smith and company deliver a fine set of performances, one for each lake (Erie, Huron, Ontario, Michigan, and Superior) as well as Lake St. Clair, an honorary sixth Great Lake in the eyes of many.Handsomely packaged and thoughtfully annotated, this is 90 minutes of thoroughly modern, top-shelf avant-garde jazz.The angular theme of “Lake Michigan” kicks things off and at just under twenty-two minutes is the longest of the pieces presented. Lindberg and DeJohnette skitter and scurry about, creating a malleable backdrop over which Smith and Threadgill improvise with aplomb.“Lake Ontario” is the shortest of the suites and filled with tension as Smith’s trumpet and Threadgil’s flute dart over Lindberg’s bowed bass and DeJohnette’s drums.Rounding out the first CD is “Lake Superior.” Toying with convention, this is the foursome at their finest. Propelled by DeJohnette’s manic work at his kit, a groove seems to always be lurking around the next bend.The second CD leads off with the stately “Lake Huron.” With Smith stating the plaintive theme, Lindberg aggressively bows his bass while DeJohnette continues to be a driving force on his skins. Drama continues to build as Threadgil joins the fold then suddenly things break down. Reconvening with an air of “calm,” the horns solo in plaintive fashion.“Lake Erie” opens with Threadgil’s bass flute. Evoking an underwater quality, this suite is yet another fine vehicle for solid ensemble work as well as improvisation.“Lake St. Clair” brings the program to a satisfying close with the instrumentalists once again displaying a sense of empathy for one another as they strive to get inside and out of Smith’s composition.Having been through the complete Suite three times as of this writing, this is jazz that is rich in discovery. Each subsequent listen has revealed a new level of interaction or instrumental virtuosity.Thirty second sound samples can’t even begin to convey the essence of this music. Fans of the avant-garde as well as those who fancy the individual players will find this an essential title in their listening library.
T**2
A highest class piano-less free jazz quartet work, but not as ambitious as 'Occupy the World'
[some revised general points:]The compositions: All pieces but the last with its terrible funk-comp ending are great compositions very much in the usual W. L. Smith-style. Compared to the previous TUM Records disc ['Occupy the World' / TUM 2013], this collection of six suites is not nearly as ambitious, but an equally great collection of finely orchestrated pieces with lively melodies.The performances: All of the four musicians play masterfully - only John Lindberg is not as good as e.g. in his super-masterful soloist part in 'Mt. Kilimanjaro' [from 'Occupy...']. Still, everyone, Lindberg included, plays with highly virtuosic and tasteful style, with everyone's parts suiting perfectly the overall highly energetic yet varying and all-through-extended [from single phrases to the whole work] emotional feeling. Smith is the highly virtuosic himself with a super-sonorous/lively sound, H. Threadgill excells esp. in the alto saxophone [in four pieces], Lindberg is a master throughout and DeJohnette plays in his own trademark virtuoso-style, but with no constant patterns [swing nor backbeat category] shown.The whole: there is a highly unifying spacy/extended emotion as well as different characters to both the pieces (=suites) compared with each other as well as between the parts combining the suites. The music is lively and melodious, though 'Occupy...' was - due to orchestration possibilities - much more varied and even more melodic compared to this highly diverse and colourful work in its own right.Recommended: to fans of W. L. Smith or anyone else in this band, high-quality free improvisation combined with skillfully orchestrated two-horn melodies, extended yet varying musical-emotional artistic content [supported by >80% improvised parts] or simply "high energy water music in the free jazz style".P.S. I would've given this full five stars, if there hadn't been the need to reserve the top points for a Smith-work like 'Occupy the World'.
M**M
Superb
Superb
C**1
La tournée des Grands Lacs
«N’allez pas là où le chemin peut mener.Allez là où il n’y a pas de chemin et laissez une trace.»Cet aphorisme du poète et philosophe Ralph Waldo Emerson résume parfaitement l’œuvre musicale et le parcours artistique du légendaire Ismael Wadada Leo Smith.Après « Ten Freedom Summers », une exceptionnelle et monumentale fresque sur l’histoire des USA centrée principalement sur les mouvements civiques qui ébranlèrent le pays, le musicien afro-américain se lance, un an plus tard, dans un nouveau projet d’envergure. Mais ce projet, même s’il a de nombreuses affinités musicales avec l’opus politique et militant, poursuit un autre chemin, tout aussi expérimental et personnel, celui amorcé au milieu des années 80 que l’on pourrait qualifier de «naturaliste», d’«organique», voire d’«écologique». Le point d’ancrage de cette ère musicale pourrait être, par exemple, la performance duale « The Blue Mountain’s Sun Drummer » gravée avec le batteur Ed Blackwell en 1986 (mais seulement publié en 2010). Depuis, le trompettiste se frotte régulièrement avec les quatre éléments qu’il associe à une quête philosophique et spirituelle qui, elle, est issue des fécondes seventies. Dès lors, son évolution artistique va prendre une ampleur métaphysique et transcendantale. Comme Kant et sa célèbre «Critique de la raison pure», le travail de Leo Smith s’exprime, de manière absolue, à l’aune de «toute connaissance qui ne porte point en général sur les objets mais sur notre manière de les connaître, en tant que cela est possible a priori».Le 20 décembre 2012 — jour précédant la fin du monde annoncée et relayée à longueur d’antennes, le musicien convie trois autres musiciens dans l’esprit de ses «Golden Quartet» pour réaliser une œuvre prolongeant les discours-fleuves de ses doubles albums. Le gigantisme, la longueur de chaque pièce et la densité narrative caractérisent ses créations discographiques. Cette démesure n’est aucunement accompagnée de prétention, de suffisance ou de grandiloquence. Ce qui anime Wadada c’est la possibilité de dérouler le fil de la vie sous toutes ses formes (fleurs, paons, rivières, éléphants, sources, serpents, minéraux, kangourous, collines, gazelles, plantes, chiens, montagnes, canyons, rapaces, jardins, humains, qu’ils soient célèbres ou inconnus, etc.), de déployer la quintessence de ces formes à des rythmes qui leur sont propres.Ainsi, c’est en toute humilité et simplicité que notre rastafari part à l’assaut des Grands Lacs d’Amérique du Nord, région qu’il imagine comme l’un des poumons bleus de notre planète. C’est la seconde fois que le trompettiste aborde les rivages des vastes étendues d’eau douce. « Lake Biwa » enregistré en l’an 2000 était une superbe estampe japonaise qui s’inscrivait par ailleurs dans ses racines africaines. Mais c’est bien la première fois qu’il consacre toute son énergie à six morceaux tournés exclusivement vers cette thématique. «The Great Lakes Suites» brosse, tel un retour aux sources, une histoire géologique vieille de dix mille ans et qui démarre à la fin de la dernière ère glaciaire. Chacune des cinq pièces est consacrée à un grand lac en particulier, une dernière pièce étant dédiée à Sainte-Claire, lac mineur que beaucoup de Nord-Américains voient comme le sixième membre d’une seule et grande famille. Le morceau le plus court dure un peu plus de 9 minutes et le plus long près de 22 pour une belle moyenne de 15 minutes. À l’intérieur des pièces, toutes composées par Smith, plusieurs mouvements se succèdent ou se chevauchent comme des mosaïques plus ou moins colorées, certaines saturées de chaleur et d’effervescence, d’autres imprégnées de froideur calme et contemplative, d’autres encore de dépouillement lumineux ou d’introspection ténébreuse, le tout évoquant l’apparente planéité des physionomies lacustres. Mais, lorsqu'un soliste ou un duo en brouillent la surface, le climat musical devient plus complexe, plus profond, plus versatile, presque insaisissable.Alors cette heure et demie est-elle une œuvre de jazz? Peut-être… Est-ce du free jazz? Oui et non… Est-ce une musique d’avant-garde? Sûrement… Une musique de chambre? Sans aucun doute… Mais c’est surtout une œuvre hors du temps, hors d’âge, hors des classifications et autres étiquettes. Elle est sans préjugés, sans conventions ni règles préétablies. Elle n'est même pas à la marge des sentiers battus et rebattus, leur préférant des chemins inexplorés qui peuvent mener nulle part. Ces 90 minutes ressemblent parfois à une langue morte, parfois à un espéranto issu de la nuit des temps mais encore bien vivant, parfois à un langage babélien et donc difficile à comprendre, à appréhender. Ainsi plusieurs écoutes peuvent être nécessaires — on peut au début les espacer — pour pénétrer cet univers qui est souvent rude, âpre, austère, brutal mais qui peut être aussi hospitalier, délicat, fécond, exubérant.Le quartet polyphonique est à la mesure de ces grands espaces et il faut souligner que chaque musicien prend une part égale et intrinsèque dans la réussite artistique de ce double album. Ce petit collectif invente un autre temps, un autre espace, offre une identité sonore unique et surprenante en adoptant une multitude de formes, de textures, de saveurs, de fragrances. Enfin le plus étonnant reste la part entre l’écriture des suites et l’improvisation. Difficile de démêler ce qui est issu de la composition et ce qui est du domaine de l’imprévu. Tout s’imbrique circulairement, même dans l’imperfection revendiquée et réitérée par ces quatre musiciens aux pensées télépathiques et fusionnelles.LE QUARTETWadada Leo Smith (trompette), Henry Threadgill (saxophone alto, flûte et flûte basse), John Lindberg (contrebasse), Jack DeJohnette (batterie)Les trois musiciens que Smith a invité pour ces longues suites sont tous issus de la scène bouillonnante de Chicago, capitale, de par ses taille et culture, des fameux Grands Lacs.Commençons par présenter Henry Threadgill. Le multi-instrumentiste chicagoan est un vieux compagnon de route de Leo Smith. Les deux soufflants se connaissent depuis la fin des années 60 lorsqu’ils participèrent à l’aventure de l’«Association for the Advancement of Creative Musicians». Le pianiste et initiateur de l’AACM Muhal Richard Abrams en est la pierre angulaire et a facilité l’éclosion d’une nouvelle génération de musiciens de jazz, tendance avant-garde. Threadgill et Smith ont ainsi enregistré en 1969 pour le mentor sur l’album « Young at Heart/Wise in Time ». Puis plus rien entre les deux hommes sur le plan discographique pendant quatre longues décennies. Bien sûr, leurs routes se sont souvent croisées lors de festivals ou autres performances. C’est lors d’une tournée en 2012 avec Abrams — décidément — que Smith a évoqué son ambitieux projet lacustre. Hurler avec Leo voilà une entreprise qui ne pouvait que plaire à Henry, musicien d’une riche polyvalence et d’une curiosité insatiable car renouvelée.Faut-il évoquer le cas Jack DeJohnette? Si ce n’est, de ces cinquante dernières années, le plus grand batteur de jazz encore en activités — que Roy Haynes, Andrew Cyrille ou Joe Chambers me pardonnent, c’est bien celui qui possède une discographie des plus touffues et des plus insolites. Comme Threadgill, DeJohnette est natif de Chicago et a frétillé au sein de l’AACM de Muhal Richard Abrams. Sa première collaboration en studio avec Wadada est assez récente puisqu’ils gravent « Golden Quartet » au crépuscule du XXe siècle. La première plage de cet opus plein de braises est dédiée au batteur et en porte d’ailleurs le nom. Suivront deux autres galettes dont le beau et très accessible « The Year Of The Elephant ». Les suites lacustres en sont les prolongements grandeur nature.Quant au benjamin de l’équipée sauvage, il est originaire de la région de Détroit mais a fréquenté très jeune la scène chicagoane puis l’avant-garde new-yorkaise sous l’égide bienveillante d’un autre fleuron issu de l’AACM, un certain Anthony Braxton. Après avoir marqué de son empreinte le label défricheur «Black Saint», John Lindberg mène depuis plus de 30 ans une fructueuse carrière expérimentale de leader et c’est dans ce contexte créatif qu’il a sollicité Wadada Leo Smith pour deux albums gravés en octobre 2000. Depuis 2004, le contrebassiste entretient une relation privilégiée avec le trompettiste. Il lui a ainsi prêté ses talents d’improvisateur à six reprises pour des œuvres monumentales  de Smith. Disposant d’un registre musical extrêmement étendu, il est l’homme de la situation pour affronter les gigantesques réserves d’eau douce, permettant, en étroite relation avec l’homme des percussions, d’allier une pulsation libre de toutes entraves à une ample palette chromatique.Les trois convives connaissent donc leur leader sur le bout des notes. Par contre, Threadgill, DeJohnette et Lindeberg n’ont jamais rien gravé ensemble. La partie s’annonce donc délicate mais, comme souvent pour la musique improvisée, le risque en vaut la chandelle plus que de raison.Double album (90 minutes 21)Le label finlandais «TUM Records» nous propose un beau digipack en carton avec un livret de 40 pages qui comprend des portraits photographiques, une introduction et quelques poésies de Wadada Leo Smith, plus un texte de John Litweiler, musicologue spécialiste du free jazz et des musiques improvisées.Disque 1 (41 minutes 46)1. «Lake Michigan» (21 minutes 54)L’ÂGE DÉGLACEÀ l’ouverture, un unisson fragile des souffflants pousse une longue tirade aux accents amérindiens. Ponctuellement, un entrefilet mélancolique du trompettiste s’immisce dans la complainte dissonante. Deux rythmes sous-jacents et tout en opposition baignent l’atmosphère comme aux premières lueurs du jour. La contrebasse évoque la course hésitante du soleil tandis que la batterie répercute les derniers bruits angoissants et confus de la nuit. Une plainte suraiguë étire l’aube phosphorescente. S’enclenche alors un grouillement sonore sous la surface mélodique.Deux curieux animaux se font face. Ils se répondent, s’invectivent, se coupent le sifflet. Les esgourdes sont un peu désorientées par tant de chahut. Il est bien difficile de déterminer la tessiture propre à chacune des voix qui, de surcroît, se mêlent au grincement des cordes et aux bourrasques asymétriques des percussions. Leurs timbres très proches créent des sonorités acides et gutturales. Le phénomène incertain s’amplifie quand nos deux créatures soufflent à tue-tête puis, sans transition, scandent une sorte d’hymne lyrique et spectaculaire. La brume harmonique s’élève, dégageant ainsi l’horizon jusqu’alors indéfini. On savoure une dernière salve exaltée avant que l’altiste n’écarte, pour de longues minutes, son leader trompettiste.Dans un premier temps, Threadgill avance à tâtons, psalmodiant dans les graves. Devant, en éclaireur, Lindberg claque des notes franches et syncopées. Juste ce qu’il faut pour guider les pas du saxophoniste dont le nasillement aigu alterne avec un bourdonnement velouté. Excité par les claquements des cymbales qui précédent les roulements explosifs des tambours, il se met à pousser des cris d’une stridence insoutenable. Le temps est à l’orage. Les deux éléments rythmiques se déchaînent, entraînant leur camarade sur des sentiers free délirants.Le retour fulgurant de Smith signe la fin de la balade. Au coude à coude, les soufflants réitèrent des coups de klaxon irritants, refoulent des borborygmes primitifs. Un ultime scintillement de la cymbale ride marque la fin du premier acte. Un long silence envahit les grandes eaux figées dans la glace depuis des lustres.Début du deuxième mouvement. Wadada Leo Smith couvre l’espace hostile en allongeant des notes au lyrisme chaotique. La fragilité extrême est exacerbée par le bruissement caverneux des cymbales et les notes frêles et prolongées d’une contrebasse sourde. L’heure est grave, le climat tendu, prêt à se rompre à la moindre chausse-trape musicale. Le trompettiste expulse une lexie troublante et éraillée, perçant à jour le miracle qui s’opère devant nos ouïes ébahies. Un souffle acéré égrène la lente fonte des glaces. Le temps s’immobilise au point paroxystique avant de basculer, sous les saillies suraiguës, vers une somptueuse débâcle des eaux glaciaires, entraînant sous leur poids de brusques changements climatiques. À fleur de peau, les cordes abrasives accélèrent cette brutale métamorphose. En arrière-plan, des vibrations métalliques étouffées s’escriment à canaliser le gigantesque tumulte diluvien. La corne sifflante et les cordes écumantes finissent par regagner le lit du lac ainsi créé.Au milieu du gué, un interlude rythmique minimaliste prend possession des lieux. Jack DeJohnette marque un tempo saugrenu en tambourinant le cercle d’acier de ses fûts. Les baguettes impriment une pulsation légère aux contours irréguliers comme pour marquer l’écoulement sédimentaire et l’érosion à l’œuvre. Le tic tac de l’horloge géologique semble se heurter à des obstacles naturels en formation. Sans transition, un claquement de cymbales précède le martèlement métronomique des peaux. Un vibrato sorti des abysses pétrifiées tend de nouveau l’atmosphère. Se frottant sourdement aux cordes, le contre-archet sépulcral et lancinant perturbe le déroulement anticyclonique. De concert, les soubresauts percussifs intensifient le malaise. Après un staccato oppressant sur les cordes, l’archet décroît en rebonds redoublés comme descendant au tréfonds des crevasses. La dissonance duale frôle alors la sortie de route.Quatrième acte. Les éclats de cymbales et les roulements de tambours reprennent du poil de la bête, augurant un nouvel âge d’or. Seul en piste, Jack DeJohnette découpe son chorus avec une palette expressive tout en retenue. Pas de temps mort, ni point fort. Pas de ligne droite, ni d’arabesques virtuoses. Sur une fine crête fluctuante, l’équilibriste ponctue sa prestation tel un bateleur annonçant un numéro insolite au sein du cirque lacustre. Et on peut dire que la surprise est de taille avec la prestation lourde, étouffante de John Lindberg. Des sonorités de plus en plus sourdes et ténébreuses plongent en deçà de l’imaginable, l’angoisse monte en puissance. L’archet joue aux montagnes russes, la rupture harmonique semble inévitable, la peur de l’inconnu submerge les esprits.Fin de la pièce. Le quartet s’est mis en tête de nous fracasser les tympans. Les brames et grincements hérissent les poils, les barrissements et cognements étrillent le ciboulot, les hurlements et crépitements lacèrent les neurones, les aboiements et grésillements siphonnent ce qu’il reste de conscience. Mais, au bout du compte, affleure une sorte de magma en fusion qui réchauffe les lieux inhospitaliers en les transformant en une réserve d’eau douce et fertile. Un ping-pong détonant entre nos quartettistes parachève la métamorphose. Par l’altérité, la synergie entre les différentes personnalités musicales a donné forme à un espace sonore sans commune mesure, découvrant ainsi que le chaos donne naissance à la vie, que, sous les impulsions improvisées et hasardeuses, s’épanouit une musique vivante et paradoxalement intemporelle.Dans l’ultime minute, en revenant à son point d’origine, la mélodie grinçante ferme définitivement le seul grand lac à demeure états-unienne.2. «Lake Ontario» (9 minutes 12)SUR LE SENTIER DE LA GUERREEst-ce parce que le lac Ontario est le plus petit des cinq Grands Lacs que cette pièce musicale est la plus courte du double album? En tous cas, c’est l’une des plus intenses, celle qui laisse une trace indélébile tant la mélodie lancinante marque les esprits, une mélodie qui bifurque là où l’on s’y attend le moins tant le foisonnement multidirectionnel des improvisations remue les méninges et les tripes.Henry Threadgill s’est saisi de sa flûte et, au diapason, accompagne John Lindberg dans une stridulation basse et inquiétante. À la seconde énonciation, l’ostinato suspend son vol et la flûte enchantée appelle fébrilement son âme sœur. La trompette enjôleuse se joint à l’étrange parade. Le chant doublé est plein d’appréhension et le dernier cri lourd d’angoisse immodérée. Puis nos deux inséparables entament une danse aux arabesques qui se figent dans leur élan, comme des cuivres se changeant en statues de glace. Ils semblent être sur le qui-vive. Il faut dire que les ponctuations mouvantes de Jack DeJohnette ne rassurent en rien de la situation tragique.Plutôt que de la dédramatiser, un silence prolongé plombe l’ambiance. Un frémissement métallique relance le leitmotiv obsédant. Nouveau silence oppressant. Les éclats amples et grinçants de la trompette, les répliques modulées et entrelacées de la flûte, l’attente percussive, la gravité sous-jacente des cordes distillent sans équivoque une menace pour les tribus lacustres iroquoises face aux hordes d’envahisseurs blancs. Ce déploiement contigu puis mêlé est annonciateur de grandes manœuvres guerrières.Après ces préparatifs d’une précision d’orfèvre, le court silence est brisé par une cymbale chauffée à blanc. Le contrebassiste se lance dans un chorus phénoménal dont les fluctuations sont à la mesure du danger imminent. Caresses versatiles, frottements élastiques, grondements rageurs, cisaillements impromptus… John Linberg est décidément un immense interprète, un improvisateur hors pair. Son jeu peut être vif comme l’éclair, tempéré ou sous-tension, délicat ou abrupt mais toujours musicalement juste et affûté. Et son association avec, en contrepoint, un DeJohnette survolté tient du prodige. On est avec eux, invisibles mais omniprésents, à l’image des coureurs des bois pistant l’ennemi, flairant la moindre odeur, décelant la plus petite trace, faisant mouche à tous les coups. Subrepticement, le duo trompette-saxophone en rajoute une couche dans la dramaturgie tels des couteaux farfouillant dans les plaies. Le tandem Lindberg-DeJohnette poursuit son travail de sape, plus téméraire que jamais, faisant flèche de tout bois.Puis survient un grand saut dans le temps. Wadada Leo Smith n’éprouve pas ici le besoin de raconter la guerre. Le trompettiste invoque les martyres qui jonchent les champs de bataille, les morts qui restent seuls une fois les armées retirées. En alternant les effets de souffle étouffés, les cris hallucinés, les intonations obturées, les vibrations tranchantes, les roucoulements étranglés, les entrelacs brouillés, il déverse le trop-plein de ses émotions, le tout sans complaisance ni fausse pudeur. Sa douleur spirituelle extrême est franche, sincère, comme si les événements venaient juste de se terminer. Et ses larmes de sang coagulent en une violence contenue, hypersensible. On sent que celle-ci peut resurgir à tout instant car son deuil est inextinguible et le fracas des fûts en accentue le ressentiment.À la lisière de la tragédie, un chant flûté oscille entre mélancolie et allégresse, entre trouble et insouciance, tel un souffle printanier qui n’aurait pas encore fait fuir les frimas de la rigueur hivernale. Le doux murmure ressemble à s’y méprendre à une rêverie debussyenne, ou peut-être bien à une sonate d’un quasi homonyme de Wadada, le compositeur néerlandais Leo Smit.Sans ménagement, le trompettiste interrompt la poésie pastorale. Henry Threadgill se mue alors en joueur de fifre, Jack DeJohnette en premier tambour, quant à John Lindberg c’est en force d’appui qu’il officie. Le lyrisme saillant du leader entraîne le quartet vers le point d’origine, bouclant la structure circulaire de la composition lacustre. Sans cesse sur le pied de guerre, les peuples autochtones devront faire face aux vagues successives des colons avides de territoires riches et sauvages.3. «Lake Superior» (10 minutes 40)LA TEMPÊTE INVISIBLELe climat est à l’apaisement mais le duo rythmique reste aux aguets. Le cervidé Lindberg pince ses cordes qui sautillent d’un bosquet l’autre, tandis que la girouette DeJohnette multiplie les tempi chaotiques au gré des vents. Entre dans la place un unisson fragile et glacial des soufflants. Telle une bise boréale, un leitmotiv grêlé de blues à la lumière aveuglante inonde lentement le plus vaste lac d’eau douce du monde. Étonnamment, les intempéries s’évanouissent comme elles ont surgi. L’été indien veut résister mais le répit météorologique est de courte durée. La tempête de froid s’accroît, cette fois-ci sous les coups de boutoir d’un batteur pris de frénésie convulsive. Les cuivres redoublent d’effort en soufflant littéralement le chaud et le froid. Sous les vociférations suraiguës, les conditions climatiques se dégradent à vue d’oreille. Quelques nappes de son brûlantes et ascendantes se forment au contact des rudes tourbillons percussifs. L’ouragan free se calme même si de longues modulations angoissantes du duo jaillissent de-ci de-là .À son tour, le staccato obsédant de la contrebasse monte en pression. Soutenu par les rafales de DeJohnette, John Lindberg entretient savamment la tension orageuse. La haute poussée estivale et la basse pression hivernale se télescopent bruyamment, déclenchant un solo explosif de Wadada. En quelques notes déchirantes, le trompettiste fracasse l’air entêtant. Dans l’esprit du sulfureux Ornette Coleman , une déconstruction musicale est à l’œuvre. Les quelques spirales au lyrisme vibrionnant sont pulvérisées sous les ronflements étouffés ou les fulgurances poisseuses. Le flux sonore et polyphonique est constamment souillé par des vagues écumantes de salissures.Profitant d’une légère accalmie, Henry Threadgill se fraye un passage délicat. Son élocution hésitante accouche d’un swing bringuebalant, presque inaudible. Puis, mis sur la sellette par une rythmique bouillonnante, le saxophoniste reprend à son compte les aspérités déployées par son leader. La houle harmonique grossit sous les salves térébrantes, ruades persifleuses et autres grognement geignards. Soudain, une corne de brume lâche dans le blizzard un appel au secours désespéré.À bras-le-corps, contrebassiste et batteur reprennent la direction des événements. Les ondes des cordes se propagent avec une violence imperceptible, les secousses percussives submergent l’espace littoral. Un dernière pincée de notes cinglantes déclenche une déferlante scélérate qui abrège les souffrances de la biosphère lacustre.Après cette furia tempétueuse, le motif originel reprend ses droits. Cette fois-ci, c’est un laconisme lyrique qui investit la place. La fanfare triste et diaphane s’avance doucement et, tout en contrepoint, constate l’étendue de la catastrophe avec sa cohorte de naufrages.Une ultime bordée de pleurs exhale avant que le duo rythmique n’achève l’oraison funèbre.Disque 2 (48 minutes 35)En cours d'écoute et d'imprégnation. Commentaire à suivre… Ten Freedom SummersThe Blue Mountain’s Sun DrummerLake BiwaYoung at Heart/Wise in TimeGolden QuartetThe Year Of The Elephantœuvres monumentalesOrnette Coleman
M**N
JAZZ CONTEMPORANEO PARA TIEMPOS FUTUROS
Wadada Leo Smith lleva una racha imparable. Primero fue "Sonic Rivers" con John Zorn, luego el disco con Vijay Iyers y ahora este y otro magnifico titulado "Ocuppy the world", estos dos ultimos dobles y magnificamente editados por TUM. Este como su nombre indica es una suite dedicada a los cinco grandes lagos mas el lago St.Clair. Wadada es un musico poco conocido, trompetisa magnifico que esta en su mejor momento. Nacido en Leland Missisipie 1941. El mismo cosidra a sus maestros a Amstrong, Miles, Cliford Brown y Don Chery...entre otros pero realmente pertenece a la escuela de Chicago y fue miembro de la inolvidable AACM. Musica de vanguardia pura y dura, compañero de Anthony Braxton y Henrry Threadgill. Estamos hablando pues de una musica libre y poderosa, descendiente directa de Ornette Coleman. Basta ver los musicos de este disco, un cuarteto sin piano, para intuir su contenido. Henry Threadgill, John Lindberg , Jack DeJoette y el propio Wadada. Es un disco importante, denso pero musicalmente perfecto. Musica libre para musicos libres de toda atadura. Un disco doble inmenso.
F**O
Five Stars
very good
K**R
As expected. Arrived on 07 April,
As expected. Arrived on 07 April, which is down to the postal service
Trustpilot
2 months ago
1 month ago